Planète Anorsite concernant les troubles du comportement alimentaire |
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Mon histoireMoi, Yiskah, 27ans, je fais le métier de mes rêves ( professeur de musique ! ), je suis amoureuse de l’homme avec qui je vis, je suis heureuse de vivre, bien dans mon corps et épanouie…. Pourtant, ma vie n’a pas toujours été rose ! Avant ma maladie, j’étais une enfant comme les autres, je vivais dans une famille soudée avec mes parents et mon petit frère et mes trois grandes sœurs. La seule vraie différence qu’il y avait entre mes frères/sœurs et moi, c’était qu’eux étaient pressés de grandir… pas moi ! Le temps passant, je devenais de plus en plus anxieuse et même angoissée de la vie. Les questions sur l’orientation après le collège, les études après le bac, le métier qu’il fallait déjà presque choisir, etc… J’étais encore au collège, et ces questions m’effrayaient ; Moi, je ne voulais pas grandir ! Un jour, j’avais 15ans, je me suis laissé intriguer par cette balance rose dans la salle de bain. Ca fait quoi si je monte dessus ? tiens… 43Kg. Quelques semaines plus tard, j’ai retenté l’expérience, et là… 44-45Kg. J’ai réalisé que mon corps changeait et que je n’étais plus la petite fille d’avant. J’avais encore plus peur car la vie me poussait vers l’âge adulte, vers la sortie de l’enfance, vers la sortie tout court. Tout ça était inconscient à ce moment, mais je me suis mise à contrôler mon poids pour essayer d’arrêter le temps. D’abord, revenir à 43Kg pour me rassurer. Ensuite 40Kg pour que ce soit plus rond ! Mais je ne changeais pas. Peut-être 38Kg ce serait mieux (c’est plus la quarantaine, mais la trentaine ! ). Entre temps, je suis tombé en amour pour mon professeur de musique, c’était une femme, et au plus profond de moi, je voulais qu’elle me prenne dans ses bras, et me garde près d’elle à jamais. Cela à conforter mon besoin de maigrir pour être sa petite chose fragile, asexuée, pure, son petit ange… Finalement, les Kilos perdus, ce n’était jamais assez… 37… 36… 35… 34… 33… C’était en aout 2000, j’avais 19ans et je venais d’avoir mon bac S alors que je ne le voulais pas pour rester au lycée. Pour moi, il n’y avait rien à la rentrée, le vide sidéral ! J’étais fatiguée avec mes 33Kg et j’ai été hospitalisée pour la première fois dans un service spécialisé pour les anorexiques et les boulimiques. Je devais prendre 10Kg pour sortir, je n’avais pas le droit de téléphoner, pas de visites, pas de courrier, mais juste le droit de me reposer. C’était trop dur pour moi ce contrat, et puis revenir à 43Kg c’était tout effacer et revenir en arrière. En plus, on m’avait posé une sonde dans le nez pour me faire grossir contre mon grès. Et ça, pas question ! Pour être grosse à nouveau, dans un corps d’adulte et être abandonnée, jetée dans le monde des adultes comme dans la fosse aux lions ? Non, non, autant mourir ! Et je l’ai souhaité de mourir, je l’ai préparé, prévu et même que je me sentais déjà libérée de savoir la date toute proche de ma fin… Que j’ai mis à exécution… un soir de novembre, dans ma chambre d’hôpital… je me suis pendue avec un cordon au crochet de la porte de ma chambre… je me suis sentie partir… …Mais je me suis réveillée en réanimation. Un infirmier m’avait trouvée… mais pourquoi il ne m’a pas laissée ! Pourquoi ? Je dois recommencer, mais j’ai peur. Si peur, peur de moi, peur de la vie, peur de tout et aussi mal partout, je suis paumée ! Dans cet hôpital, on ne pouvait plus m’aider alors on m’a transféré dans un autre hôpital pour jeunes suicidaires où je n’attendais plus rien de la vie, si ce n’était de quitter ce lieu pour mettre fin à mes jours à nouveau. D’ailleurs, j’en suis sortie juste avant noël, pour passer des fêtes horribles, entourée de bouffe, de chocolat en abondance avec dans la tête le désir de disparaître. J’ai maigri de nouveau à 38Kg pour m’alléger le cœur, mais je n’en pouvais plus, car on fond, elle me faisait vraiment souffrir cette maladie. Au point que j’ai craqué en avalant tous mes médicaments anxiolytiques. Je me suis réveillée deux jours plus tard dans un asile de fous. C’était en janvier 2001. J’ai du reprendre 7Kg pour sortir de cette prison, et je n’ai réussi à me libérer des griffes de cette psychiatre que en septembre en faisant des études assez loin pour qu’elle me laisse partir. J’y suis allée à la fac de musicologie, seule dans mon 9m2, libre de ne plus manger, sans personne pour m’en empêcher, et surtout plus cette psy ! En plus, je retrouvais ma prof de musique que j'aimais tant.Alors je suis passée de 45kg à 43 puis 40… 38… 36… Trop dur la fac, j’étais épuisée et malheureuse, seule, complètement abandonnée. Je suis allée dans un nouvel hôpital de mon plein grès en octobre 2001, mais je n’y arrivais pas, c’était trop dur de manger… trop dur… et puis même si je mangeais devant les infirmiers, j’étais seule et libre de tout vomir dans les toilettes. Du coup, j’ai continué à maigrir, ce qui m’a valu de me retrouver en réanimation dans un autre hôpital avec une sonde dans le nez et la souffrance au corps. J’y ai passé un joyeux noël, isolée dans ma chambre, avec pour seule compagnie cette foutue sonde qui me gavait. Je n’attendais rien de noël, je m’en fichais, encore que, j’aurais aimé que le père noël m’apporte dans mon soulier un billet simple pour le paradis ! Je ne mangeais rien, mais avec le gavage, le 31 décembre 2001, je faisais 40Kg, les médecins m’ont dit « Au revoir » et m’ont lâchée dehors. 2 semaines plus tard en janvier 2002, j’avais perdu 12Kg. 2 semaines m’ont suffi pour passer de 40Kg à 28Kg. Moi, je les aimais bien mes 28Kg, d’ailleurs, je visais les 25. J’aurai bien fini par disparaître enfin ! Mais non, je ne disparaissais pas, mais paradoxalement, mon corps me semblait de plus en plus lourd, et il me faisait très mal. Aussi, un jour, en voulant me lever du canapé pour rejoindre mon lit, je suis tombée par terre. Pas comme tous ces malaises qui passaient et où je me relevais, mais un malaise où je suis restée par terre. J’ai même du ramper pour aller à mon lit. Cette fois, j’avais atteint mes limites. Mes parents m’ont emmenée aussitôt aux urgences. J’y suis restée 3 semaines pour me requinquer un peu avant d’être transférée dans un autre hôpital loin de chez moi où je suis restée près de 7mois avant de retourner à l’asile suite à une « tentative d’évasion ». Je faisais 36Kg. A l’asile, j’ai fait semblant d’aller mieux, d’accepter la prise de poids, et surtout, je recrachais discrètement tous mes médicaments qui avaient fait de moi un légume au premier internement dans cet asile. Après tout ce semblant, et surtout avec l’aide de mes parents, j’ai réussi à sortir de cet asile où la psy voulait m’enfermer à vie sous prétexte que je n’étais pas capable de vivre « en société ». C’était en Hiver 2002 Pendant 4ans, je me suis battue contre mes démons tout en poursuivant mes études de musique. Je me suis accrochée à la musique, ma passion. De part la difficulté du cursus et mes faibles revenus d’étudiante, j’ai fait une rechute en tombant à nouveau à 33Kg. Mais, je ne voulais pas aller plus loin, mes souvenirs douloureux de ma déchéance des 28Kg étaient trop frais dans ma mémoire et je ne voulais plus souffrir à ce point. Cette fois, je voulais vraiment m’en sortir, apprendre à revivre, à manger, aimer manger sans culpabiliser, et apprendre à m’aimer avec mon vrai corps, celui que j’étais censée avoir si je ne le martyrisais pas ! Pour cela, j’avais besoin d’aide, un dernier coup de pouce, et cette aide, je l’ai trouvée, en janvier 2006 auprès d’un médecin qui a eu beaucoup de patience avec moi, qui m’a assuré qu’elle ne m’abandonnerai pas après la prise de poids, qu’elle serait là pendant mes angoisses et pour appréhender toutes mes peurs. Elle a tenu sa promesse, elle ne m’a pas laissé tomber, et surtout, elle m’a comprise, m’a mise en confiance et a pris le temps pour m’aider. Aussi, grâce à elle, j’ai compris que même guérie, dans un corps d’adulte, je ne serais pas abandonnée, que les adultes ont droit d’avoir peur, d’être rassurés et réconfortés, de ne pas être parfaits et qu’ils ne sont pas moins aimés. J’ai compris aussi que pour être heureuse, je devais apprendre à m’aimer dans un corps de femme pour ensuite être aimée par les autres. Petit à petit, j’ai cessé de me battre contre moi-même, et j’ai mis toute mon énergie à me battre pour moi-même ! Progressivement, mon corps a repris forme, et mon âme a pu cicatriser pour laisser entrer la paix et la sérénité, ensuite, quand j’étais prête, j’ai pu quitter l’hôpital avec l’accompagnement de mon médecin psychiatre qui ne m’a pas lâché la main une fois dehors. C’était fin Avril 2006, j’ai préparé ma valise, dit « au revoir » à tous les infirmiers qui m’avaient encadrée, aux patients qui continuaient de se battre, et Hubert, mon infirmier référent qui croyait en moi, m’a accompagné à la porte du service en me souhaitant bon courage pour la suite. La porte s’est fermée derrière moi, j’avais le baume au cœur d’aller à l’encontre de ma nouvelle vie, mais aussi un peu de nostalgie de quitter ce lieu qui m’avait tant aidé. Surtout, si je n’ai pas eu peur de partir ce jour là, c’est parce que je savais que j’allais revenir une fois toutes les semaines pour voir ce médecin qui ne m’avait pas lâché la main, prendre le repas avec mes amies qui étaient encore là et partager ma nouvelle vie avec le personnel soignant qui seraient fières de me voir épanouie. Ce jour là, j’ai transformé mon appartement le temps d’aménager dans un nouvel appartement tout neuf, j’ai découpé tous les vêtements qui étaient maculés d’anorexie avant de m’en débarrasser et j’ai jeté aux ordures la balance qui m’avait poussé dans le puits de l’enfer anorexique. Bref, j’ai enlevé toute trace de ce passé douloureux pour le remplacer par de la couleur. Enfin, ma vie s’est colorée davantage en rose quand le premier dimanche de septembre 2006, on s’est embrassé. C’était la fin d’un enfer, c’était le début d’une grande histoire d’Amour, un grande histoire de vie… Aujourd’hui, moi, Yiskah, 27ans, je fais le métier de mes rêves ( professeur de musique ! ), je suis amoureuse de l’homme avec qui je vis, je suis heureuse de vivre, bien dans mon corps et épanouie….
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